VI. Fibre optique. Composants, interfaces et couplages

Sources d'émission (DEL, DL) Composants de réception (photodiode, phototransistor). Interfaces et couplages, émetteur-fibre et fibre-émetteur. Sources bibliographiques.

1. Sources d’émission

La lumière est injectée vers un diamètre de fibre relativement petit (\(D<\) 500 mm). Seule la lumière contenue dans le cône d’admission se propagera dans la fibre.

Elle doit avoir une longueur d’onde située dans les fenêtres d’atténuation minimale : \[\rm \{0,8-0,9~\mu \rm m\}~;~\{1,1-1,3~\mu m\}~;~\{1,55~\mu m\}\]

La source de rayonnement doit satisfaire à certaines contraintes :

  • surface restreinte ;

  • directions compatibles avec le cône d’admission de la fibre ;

  • longueurs d’onde pour lesquelles les fibres présentent la meilleure transparence ;

  • largeur spectrale faible et grande intensité ;

  • temps de réponse rapide et facilité de modulation ;

  • fiabilité et économie.

1.1. Diode électroluminescente (DEL)

La diode électroluminescente n’émet qu’une faible intensité et la pureté spectrale est médiocre. D’où un usage limité aux liaisons à courte distance.

Longueur d’onde centrale du spectre d’émission spontanée : \[\lambda_g=\frac{1,24}{E_g}\qquad[1]\]

  • \(E_g\) : largeur de bande interdite (en eV)

Ce spectre, approximativement gaussien de largeur typique (\(\Delta\lambda=50-60\) nm), peut être étendu grâce à la présence de dopants ou d’impuretés.

Dans les semi-conducteurs utilisés : \[E_g\in\{0,36~\rm eV-2,2~eV\}\quad\Rightarrow\quad\lambda_g\in\{0,56~\mu m-3,6~\mu m\}\]

Les diodes émettant en lumière visible sont généralement des diodes à homojonction, mais de rendement médiocre et de coût très faible.

L’hétérojonction permet d’améliorer le rendement quantique et la rapidité de modulation. Les recombinaisons sont confinées dans une couche active de très faible épaisseur entre deux couches de confinement de largeur de bande interdite plus élevée : bonne transparence aux photons émis (amélioration du rendement externe) et indice de réfraction plus faible.

Une double hétérojonction permet d’obtenir un bon rendement.

La bande passante reste limitée (30 MHz – 100 MHz) à cause du temps de transit des porteurs. La technique d’émission par la tranche permet d’atteindre 200 MHz.

1.2. Diode laser (DL)

La diode lase émet une lumière de plus grande pureté, quasiment monochromatique. Elle est apte aux liaisons longue distance. Son prix est élevé.

La diode laser réalise à l’état solide, dans un volume restreint et sous une faible tension de commande, les fonctions d’amplification de lumière et de cavité résonante qui caractérisent le laser et qui permettent donc une émission cohérente (régime d’émission stimulée).

D’où une amplification de la lumière suivant l’axe \(Oz\) : \[P(z)=P_0~\exp(gz)\qquad\text{avec~:}\quad g=\alpha-\frac{\ln R}{L}\qquad[2]\]

  • \(g\) : coefficient de gain

  • \(\alpha\) : coefficient d’absorption

  • \(R\) : coefficient de réflexion sur les deux faces

  • \(L\): longueur de la cavité

La couche active, cavité résonnante Fabry-Perot, se comporte en guide diélectrique plan, grâce à son indice plus élevé et à la réflexion partielle sur les deux faces clivées du laser.

Le coefficient de réflexion \(R\) est assez important (environ 0,3) en raison de la forte valeur d’indice du matériau (\(n\approx 3,5\)) : \[R=\Big(\frac{n-1}{n+1}\Big)^2\qquad[3]\]

Le spectre d’émission présente un certain nombre de raies correspondant aux fréquences de résonance de la cavité \(\nu_p\) : \[\lambda_p=\frac{c}{\nu_p}=\frac{2~n~L}{p}\quad;\quad p~\text{entier (de l'ordre du mode)}\qquad[4]\]

Ces raies sont espacées de : \[\delta\lambda=\frac{\lambda^2}{2~N~L}\quad;\quad N\approx n~(\text{indice de groupe})\qquad[5]\]

Le diagramme d’émission dépend des dimensions de la région émissive. Le guide d’onde qui constitue la cavité est suffisamment étroit pour être monomode. Le faisceau émis est relativement gaussien.

Les principales structures de diode laser (mode de guidage latéral) sont :

  • les structures à guidage par gain ;

  • les structures à guidage par indice ;

  • les structures à puits quantiques ;

  • les structures à contre réaction distribuée ou DFB (Distributed Feed-Back).

2. Composants de réception

Les exigences attendues du détecteur sont sensibilité, bande passante et bruit qu’il introduit :

  • capacité de délivrer un signal électrique utilisable même si le flux énergétique reçu est faible et varie rapidement dans le temps afin de transporter un maximum d’information ;

  • rapidité pour transformer ce flux énergétique sans en déformer les variations dans le temps;

  • dimensions compatibles avec celles de la fibre pour un couplage efficace avec la lumière.

Il existe deux catégories de détecteur de rayonnement : thermiques et quantiques. Les premiers sont inutilisables en télécommunications (faible sensibilité et rapidité très insuffisante).

Dans les détecteurs quantiques, il y a transfert d’énergie du photon à l’électron d’un solide (effet photoélectrique). Le vide étant nécessaire pour récupérer l’électron émis, les dimensions de ce type de détecteur ne sont pas directement adaptables à celles de la fibre.

Photodiodes (PIN et PDA) et phototransistors sont les photo-détecteurs à semi-conducteur utilisés en télécommunications optiques.

2.1. Photodiodes

Le temps de réponse de la photodiode PIN est limité par la capacité de jonction et par le temps de transit. Il peut être réduit en élargissant la zone d’absorption des photons.

Un bon compromis est de prendre une épaisseur de la zone intrinsèque voisine de la profondeur d’absorption. Une autre possibilité est d’augmenter la tension de polarisation inverse.

Ces photodiodes ont un rendement de conversion maximale et une bande passante élevée.

Le signal reçu étant souvent très faible, le photocourant doit être amplifié, mais le bruit du préamplificateur placé après la photodiode est souvent prépondérant. On utilise alors un composant à gain interne, la photodiode à avalanche (PDA) dont le principe est l’ionisation en chaîne, sous l’effet d’un champ électrique intense.

Les photodiodes à avalanche sont utilisées pour la transmission à 1,3 et 1,5 µm. Elles sont réalisées avec les mêmes matériaux semi-conducteurs que ceux des diodes laser. Les paramètres importants qui la caractérisent sont :

  • la tension de claquage ;

  • le coefficient de multiplication ;

  • les coefficients d’ionisation ;

  • le courant d’obscurité ;

  • la rapidité.

2.2. Phototransistors

Le phototransistor est un transistor dont la base est éclairée. La jonction collecteur – base, polarisée en inverse, joue le rôle de photodiode et le photocourant est amplifié par le gain en courant du transistor (typiquement 30 à 100).

Le phototransistor est un composant à gain interne. Il est plus simple et plus fiable que la PDA, car la tension de polarisation n’est pas nécessairement élevée.

Dans le phototransistor silicium, la base doit être relativement épaisse à cause de la grande profondeur d’absorption du matériau. Le gain et la fréquence de transition sont alors peu élevés, mais l’avantage reste le faible coût.

Les phototransistors en semi-conducteurs III-V, sensibles jusqu’à 1600 nm, autorisent un gain de l’ordre de 100 à 150, et une fréquence de transition de l’ordre de 1 à 2 Ghz.

3. Interfaces et couplages

3.1. Couplage émetteur – fibre

Les sources doivent être aussi petites que le cœur de la fibre. Appliquer directement la surface de la fibre sur la surface de la source, axes alignés, est la meilleure façon d’injecter le maximum de lumière. En réalité, il existe un interstice qui ne doit pas dépasser 2 à 4 fois le diamètre du cœur.

La source émet de la lumière dans un angle solide \(\Omega\). Si le spot lumineux a une surface \(A_s\) supérieure à la surface \(A_f\) du cœur de la fibre, une partie de la lumière est perdue. En supposant un rayonnement uniforme de la source dans l’angle solide \(\Omega\), la perte de couplage est (en décibel) : \[D_s= \left\{ \begin{aligned} &10~\ln \frac{A_f}{A_s}\quad &&\text{pour}~~A_s>A_f\\ &0 &&\text{pour}~~A_s<A_f \end{aligned} \right. \qquad[6]\]

Pour évaluer le couplage entre une source de lumière et une fibre optique, il faut connaître le diagramme de rayonnement de la source et l’ouverture numérique de la fibre.

En général, le demi-angle du cône d’admission a une valeur de 10 à 14°. Le demi-angle d’ouverture à 3 dB des diagrammes de rayonnement varie de 15 à 60°.

Toute la lumière émise sous des angles supérieurs à 10° (ou 14°) est une perte au couplage de la fibre, l’idéal étant le rayonnement compatible avec le cône d’admission de la fibre.

L’intensité d’une source dans la direction d’angle \(i_0\) peut s’écrire : \[I=I_0~\cos^mi_0\quad;\quad m\geq 1\qquad[7]\]

  • \(i_0\) : intensité dans la direction de la normale

  • \(m\) : coefficient caractéristique de la source (\(m=1\) source lambertienne)

Par définition : \[I(i_0)=\frac{dP}{d\Omega}\qquad[8]\]

  • \(d\Omega\) : angle solide élémentaire dans la direction \(i_0\)

  • \(P\) : puissance de la lumière émise

Par intégration, on obtient :

  • \(P_T\) : puissance totale\([0~-\pi/2]\)

  • \(P_c\) : puissance de la lumière dans le cône d’admission\([0~-~i_{OM}]\)

La perte au couplage \(D_{ON}\) (dB) a pour expression : \[D_{ON}=10~log\frac{P_c}{P_T}=10~log\frac{(1-\cos^{m+1}i_{OM})g}{g+2}\qquad[9]\]

Pour une fibre à saut d’indice (\(g~\rightarrow~\infty\)) \[D_{ON}=10~\log(1-\cos^{m+1}i_{OM})\qquad[10]\]

La perte supplémentaire apportée par une fibre à gradient d’indice (\(g\approx 2\)) est égale à \(10~\log(0,5)=-3~\) dB.

Pour pénétrer dans la fibre, la lumière doit franchir l’interface air – cœur (\(n_0~/~n_1\)). Du fait de cette différence d’indices, une partie du flux énergétique est réfléchie (perte de Fresnel). Le facteur de réflexion est égal à : \[R=\Big(\frac{n_1-n_0}{n_1+n_0}\Big)^2\qquad[11]\]

La perte de Fresnel a pour expression : \[D_R=10~\log(1-R)\qquad[12]\]

Elle peut être réduite en interposant une couche antireflet ou une résine adaptatrice des indices de réfraction.

La perte totale au couplage est donc : \[D_T=D_s+D_{ON}+D_R\qquad[13]\]

3.2. Couplage fibre-récepteur

L’interface optique de réception comprend la photodiode, des circuits de polarisation et le préamplificateur à minimum de bruit et de distorsion aux signaux. Pour cela, on intègre la photodiode et le préamplificateur dans le même boîtier.

Première solution

On raccordement à la fibre optique par une fibre amorce ou sous la forme d’une embase active.

Cette solution est adoptée pour les liaisons à haut débit. Le diamètre de la fibre amorce est supérieur à celui des fibres du câble, afin d’éviter les pertes au raccordement.

Deuxième solution

La photodiode est logée dans l’embase d’un connecteur sur lequel le câble est raccordé. Le coefficient de couplage fibre-détecteur est moins bon que le précédent.

Les préamplificateurs sont des amplificateurs à haute impédance d’entrée ou amplificateurs transimpédance.

Les amplificateurs à haute impédance d’entrée (a) sont réalisées sans contre-réaction, avec un amplificateur opérationnel (jusqu’à quelques mégahertz) ou un transistor à effet de champ (au-delà).

Si la résistance de polarisation \(R_p\) est forte, les amplificateurs sont très sensibles et de très faible bruit.

Pour compenser la constante de temps \(\tau=RC\) (intégration du signal au-delà de la fréquence de coupure), l’amplificateur doit être suivi d’un égaliseur dont la réalisation est délicate, car \(\tau\) est peu reproductible.

Les amplificateurs transimpédance (b) ont une contre-réaction \(R_c\).

Si le gain de la chaîne amplificatrice \(A\) est grand, on a \[V_s~\approx~-~R_c~i_s\qquad[14]\]

donc un gain plat et reproductible sur une large bande passante. L’inconvénient étant que la résistance apporte un supplément de bruit.

En dessous d’une fréquence de l’ordre de 50 MHz, la structure à haute impédance est moins bruyante. Au-delà, on utilise une structure transimpédance à transistors bipolaires,moins bruyant et de très large bande passante.

Au-delà de 0,5 GHz environ, des problèmes de stabilité se posent et on doit utiliser des transistors à effet de champ GaAs ou InP, intégrés si possible avec la photodiode.

4. Sources bibliographiques

  • Theory of Dielectric Optical Waveguide Quantum Electronics D. Marcuse (Academic Press, 1974)

  • Light Transmission Optics D. Marcuse (Van Nostrand, 1982)

  • Les fibres optiques. Introduction aux télécommunications J.P. Nerou (Le Grifon d’argile inc, 1983)

  • L’optique guidée monomode et ses applications J.P. Nerou (Masson, 1985)

  • Les systèmes à fibres optiques P. Halley (Eyrolles, 1985)

  • Principles of Modern Optical Systems I. Andonovic, D. Uttamchandani (Artech House, 1989)

  • An Introduction to Fiber Optics Sustem Design B.E. Briley (North Holland, 1990)

  • Télécommunications optiques P. Lecoy (Hermes, 1992)

  • Les télécommunications F. Du Castel (X.A. Descours Berger-Levrault International, 1993)

↑ Haut